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Aspirine et RCV modéré


L’ESC a été l’occasion d’une considérable moisson d’essais très utiles et magnifiquement présentées. J. Michael Gaziano a présenté les résultats de ARRIVE, une étude ayant porté sur la prévention primaire par l’acide acétylsalicylique . Des résultats hélas en demi-teinte.

L’étude ARRIVE a porté sur des patients à risque cardio-vasculaire modéré, recruté dans 7 pays à risque CV plutôt élevé (Allemagne, Pologne, R-U, Italie, Espagne, Irlande et USA). Les patients n’ont pas d’antécédent cardio-vasculaire, pas de diabète, et un niveau de risque cardio-vasculaire à 10 ans de 20 à 30%. Il s’agit d’hommes de 55 ans et plus avec au moins deux facteurs de risque associés, ou de femmes de 60 ans et plus avec au moins 3 FR associés. Ces personnes sont randomisées pour recevoir 100 mg/j d’Aspirine gastro-protégée ou un placebo.

Le critère principal d’évaluation (CEP) est la somme des décès cardio-vasculaires, infarctus, AVC, angors instables et AIT.L’étude a été stoppée à la date prévue, mais sans avoir atteint le nombre d’évènements qu’elle visait à enregistrer, du fait d’une incidence de complications inférieure à celle escomptée. L’étude porte ainsi sur 12.546 patients, avec un âge moyen de 64 ans, 70% d’hommes avec, dès la randomisation, un niveau de risque moyen inférieur à celui escompté.

Les résultats de ARRIVE sont identiques dans tous les sous-groupes prévus.

En analyse per protocole et non plus en ITT, on observe toutefois une réduction significative des infarctus, et en analyse selon l’âge une protection significative chez les moins de 60 ans. On observe par ailleurs une augmentation des saignements digestifs avec un RR à 2.11 (p = 0.0007) mais avec très peu de saignements sévères. Les autres événements adverses ne montrent aucun signal gênant. Au total ARRIVE est une étude assez décevante, car en incluant des patients moins sévères que prévu, avec un suivi raccourci, et une compliance moyenne au traitement, les résultats ne répondent à aucune question. Il faudra donc attendre les autres études encore en cours pour essayer d’y voir clair.

ARRIVE tentait de répondre à une question très pertinente, celle de la protection des patients à risque par de faibles doses d’aspirine au long cours. Les patients ont été bien sélectionnés, pour leur risque relativement élevé. Des essais précédents ont été négatifs, et les auteurs ont cherché à se protéger des groupes où un bénéfice était prévisiblement inexistant. Le résultat ne convainc pas. Mais la responsabilité n’en revient pas forcément à l’aspirine ! Cet essai a été mené dans des pays globalement bien médicalisés, où les patients à risque sont pris en charge : on traite leur HTA, leur dyslipidémie...

Dans ce contexte, l’Aspirine n’a pas fait la différence. En témoigne une tendance à l’affaiblissement de son action à mesure que le risque CV augmente : ces patients sont vraisemblablement déjà bien pris en charge. Comment les améliorer encore ? D’autres sont plus ou moins adhérents au protocole, comme en témoigne l’analyse « per protocol » : là, l’effet sur les IDM est perceptible (RR 0.53, p = 0.0014) et l’effet sur le CEP existe en dessous de 60 ans (RR 0.54). Enfin, on ne peut évacuer l’effet hémorragique intestinal : le risque relatif est 2.11, p = 0.0007, qui vient relativiser les petits bénéfices CV, sans même évoquer les prescriptions d’IPP qui n’ont pas été détaillées. Qui ont un coût variable selon les pays, mais pas nul.

Si l’Aspirine reste indispensable en prévention secondaire, son effet sur la prévention primaire tel qu’il ressort d’ARRIVE devra faire l’objet d’une évaluation précise du patient. Bien entendu, les résultats ne répondent à aucune question et des essais en cours apporteront de nouvelles informations :

  • ASPREE : chez 19.000 personnes de plus de 65 ans en bonne santé

  • ANDAMAN : 100 mg en une ou deux fois par jour chez 2.500 coronariens diabétiques

  • ADAPTABLE : où l’on va comparer une petite dose (81 mg) à une dose élevée (325 mg) chez 15.000 personnes

Aspirin® est la propriété de Bayer en Amérique du Nord, marque déposée en 1899 ! La marque et le procédé de production sont confisqués à l’Allemagne au titre de dommages de guerre en 1918, d’où l’Aspirine des Usines du Rhône… et non l’acide acétylsalicylique.

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