Ce que l’alcool détruit en dix ans, le protoxyde d’azote peut le faire en deux : commentaire d’une interview d’expert

Longtemps considéré comme un produit récréatif anodin, le protoxyde d’azote (N2O), également connu sous le nom de « gaz hilarant » est à l’origine d’un nombre croissant d’hospitalisations et de séquelles neurologiques graves. Une interview du Dr Christophe Riou (service universitaire d’addictologie de Lyon), qui anime depuis novembre la première téléconsultation dédiée aux consommateurs, illustre le propos.

En une vingtaine d’années, l’usage du N2O a largement diffusé dans la population générale et le nombre de formes cliniquement préoccupantes a été multiplié par 10, qu’il s’agisse des polyneuropathies ou des scléroses combinées de la moelle. L’addiction à cette substance psychoactive est manifeste, même s’il n’existe pas de craving net. Il faut savoir que le protoxyde fait en deux ans les mêmes dégâts neurologiques que l’alcool en dix ans, voire plus ceci au travers d’une destruction de la vitamine B12.

C’est l’acronyme clinique PIF (picotements, instabilité, faiblesse) qui résume le mieux la toxicité neurologique du N2O, un déclin cognitif étant également possible. Ses mécanismes d’action sont imparfaitement compris, certains considérant qu’il se comporte comme un agoniste opioïde partiel, d’autres comme un antagoniste des récepteurs NMDA (avec en corollaire une désinhibition de la dopamine).

La prise en charge de l’intoxication chronique au protoxyde, au demeurant difficile, fait intervenir addictologues, neurologues et rééducateurs. L’arrêt immédiat, total et prolongé de la consommation de protoxyde s’impose dans les formes les plus sévères, qu’il y ait ou non supplémentation en vitamine B12. Il n’existe pas de traitement de substitution spécifique.

Commenté par : Dr Philippe Tellier

Source : Le protoxyde d’azote peut faire en deux ans les dégâts de l’alcool en dix ans.  COULOMB Damien ‐ QUOTIDIEN DU MEDECIN,https://www.lequotidiendumedecin.fr/specialites/addictologie/dr-christophe-riou-addictologue-le-protoxyde-dazote-peut-faire-en-deux-ans-les-degats-de-lalcool-en