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Arrêt cardiaque et adrénaline


L’arrêt cardiaque (ou plutôt circulatoire) hors hôpital se termine souvent mal. Dès lors, toute idée permettant d’espérer une amélioration doit être explorée, et lorsqu’une approche empirique prédomine, elle doit être testée.

En effet, des doutes ont émergé sur cette pratique très répandue qu’est l’injection d’adrénaline IV et les sociétés savantes ont demandé un essai randomisé contre placebo. Cet essai (PARAMEDIC2) a donc été mené au Royaume-Uni sur plus de 8.000 patients ayant fait l’objet d’une prise en charge pour « arrêt cardiaque » par des personnels paramédicaux. Hors de France, en effet, pas de médecin à bord des ambulances, mais des paramédicaux assez bien entraînés et équipés, pouvant converser par radio avec des médecins urgentistes, leur transmettre des paramètres, etc…

Ici, donc des ambulanciers du NHS (National Health Service) ont été chargés d’administrer de l’adrénaline (épinéphrine) à la moitié des patients pris en charge pour arrêt cardiaque ; le critère principal a été la survie à 30 jours. Ce critère a été constaté chez 3.2% des patients dans le groupe adrénaline contre 2.4% dans le groupe placebo (RR de survie 1.39 non ajusté, p = 0.02). Les autres critères, comme le score neurologique de sortie n’ont pas été significativement impactés, mais les patients ayant reçu de l’adrénaline ont été plus graves sur ce plan. Les auteurs en concluent que la survie a été meilleure sous adrénaline initiale mais les patients ainsi sauvés étaient plus graves au plan neurologique.

Dans le détail, certaines données émergent. Le temps moyen entre l’appel téléphonique et l’arrivé sur site a été de 6,6 minutes, et le délai ensuite jusqu’à l’administration du traitement à l’étude a été de 13,8 mn. Le taux de retour à une circulation normale a été plus élevé dans le groupe adrénaline (36,3% contre 11,7%) et aussi le taux de transportés à l’hôpital (5,.8% contre 30,7%). Le rythme cardiaque initial relevait d’une cardioversion électrique dans 19% des cas, surtout des FV. Pour les autres, on notait surtout des asystoles et des activités électriques inefficaces. Si dans 50% des cas un passant (bystander) a été témoin de la scène, dans un gros tiers, personne n’a observé la perte de conscience à son début.

Notre opinion : avec ou sans adrénaline, le pronostic des arrêts circulatoires reste gravissime, avec comme principales causes le retard aux manœuvres de réanimation et à la défibrillation rapide (traduction : durée de l’ischémie cérébrale, le cœur récupérant plutôt mieux après une ischémie). Même dans ce remarquable travail où le temps de réponse paraît largement optimal. L’adrénaline n’émerge pas comme un facteur de mauvaise évolution, plutôt au contraire, mais elle semble contribuer à rétablir la circulation dans un groupe de patients au pronostic cérébral déjà compromis, bien qu’on la suspecte en plus de perturber la microcirculation cérébrale. L’issue cardiovasculaire et cérébrale est dès lors découplée. La survie ne s’améliorera que lorsqu’une forte proportion de la population sera formée aux manœuvres de ressucitation et pourra disposer à temps d’un défibrillateur. En attendant les secours.

Perkins GD et coll. A randomized trial of epinephrine in out-of-hospital cardiac arrest. NEJM 2018 ; 379 : 711-21

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