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Polyarthrite rhumatoïde et athérosclérose : des processus inflammatoires en commun ?


La théorie inflammatoire de l’athérosclérose semble revivre à nouveau. L’immense victoire des statines sur le pronostic cardio-vasculaire et donc la théorie centrée sur le LDL cholestérol a fait oublier les autres aspects physiopathologiques de l’athérosclérose vasculaire.

Plusieurs séries de patients porteurs de polyarthrite rhumatoïde semblent montrer un risque accru d’accident cardio-vasculaire.(1) Dans une série récente suédoise, des cas incidents de syndromes coronaires aigus ont permis d’y voir plus clair sur le sur-risque lié à la présence de cette pathologie inflammatoire rhumatologique.(2)

Une cohorte de 1135 patients porteurs d’une polyarthrite rhumatoïde a été appariée à 3184 patients issus de la population générale suédoise. Les sujets porteurs d’une polyarthrite rhumatoïde décèdent plus souvent d’une mort subite cardiaque, présentent plus souvent des infarctus du myocarde avec élévation du segment ST, des augmentations de troponines plus sévères et des complications intra-hospitalières plus nombreuses. De plus, la mortalité à court terme c’est-à-dire à une semaine est significativement plus élevée chez ces patients. Ce sur-risque de mortalité persiste au premier mois avec un hasard-ratio de 1,57 (1.30-1.89). Même après ajustement pour les comorbidités et des variables socio-démographiques, cette surmortalité des patients porteurs de polyarthrite rhumatoïde persiste. Ces patients porteurs de polyarthrite rhumatoïde ont aussi plus souvent des antécédents d’angine de poitrine, de maladie thrombo-embolique, d’insuffisance cardiaque et de bronchite chronique. La prescription de diurétiques est également plus souvent rencontrée. À l’admission à l’hôpital, les patients porteurs d’une polyarthrite rhumatoïde ont plus souvent une classe élevée de Killip (témoignant d’une insuffisance cardiaque aiguë).

Physiopathologie de l’athérosclérose et de la polyarthrite rhumatoïde : de nombreuses similitudes

Lorsque l’on se penche sur la physiopathologie de l’athérosclérose d’une part, et de la polyarthrite rhumatoïde d’autre part, on trouve de nombreuses similitudes. Comme la polyarthrite rhumatoïde, l’athérosclérose est une maladie inflammatoire chronique qui atteint spécifiquement la paroi artérielle. Le stress endothélial génère l’expression de molécules d’adhésion et des perturbations du flux sanguin. L’accumulation des lipoprotéines et leurs modifications oxydatives dans l’espace intimal favorisent l’expression de molécules d’adhésion et la synthèse de cytokines pro-inflammatoires. Ainsi, on assiste à un recrutement et une activation de différents types de leucocytes comportant des neutrophiles, des monocytes et des cellules T (des cellules T helper de type 1). Dans la paroi intimale des monocytes se différencient en macrophages et prennent en charge les lipoprotéines oxydées et c’est ainsi qu’apparaissent les cellules spumeuses. Les cellules T peuvent reconnaître les antigènes spécifiques et orchestrent la réponse immunitaire. L’athérosclérose progresse en faisant migrer et proliférer des cellules musculaires lisses et en augmentant des composants de la matrice extra-extracellulaire comme le collagène, l’élastine et les protéoglycanes.

Dans la polyarthrite rhumatoïde, le processus inflammatoire est caractérisé par une activation endothéliale et par l’expression accrue de molécules d’adhésion et l’infiltration de cellules immunitaires telles que les cellules T helper de type 1 ainsi que des monocytes. La dégradation du cartilage représente le fait marquant de la polyarthrite rhumatoïde. Les produits de dégradation de cette matrice extracellulaire exposent des antigènes qui peuvent être reconnus par les cellules T et les signaux inflammatoires de l’ensemble de ces cellules perpétuent le processus inflammatoire comportant la néo-vascularisation.

De manière très spécifique des cellules T de type « CD4+ CD 28 null » ont été détectées dans le sang de patients présentant un syndrome coronaire aigu. Ces mêmes cellules ont été décrites dans la polyarthrite rhumatoïde. Ces cellules T de type « CD4+ CD 28 null » sont caractérisées par une restriction clonale présente à la fois chez les patients porteurs de syndrome coronaire aigu et chez les patients porteurs d’une polyarthrite rhumatoïde mais qui ne sont pas présentes chez les sujets témoins. L’ensemble de ces points semble indiquer le même mécanisme auto-immunitaire dans la polyarthrite rhumatoïde et le syndrome coronaire aigu.

Qu’en est-il des traitements ?

Les anti-inflammatoires ont été utilisés depuis longtemps dans la polyarthrite rhumatoïde et le méthotrexate est associé à une diminution des événements cardio-vasculaires dans une méta-analyse récente. Parmi les nouveaux inflammatoires utilisés chez les patients porteurs d’une polyarthrite rhumatoïde, il sera intéressant d’étudier les effets sur les événements cardio-vasculaires lors de la prescription à long terme des inhibiteurs du TNF alpha, des inhibiteurs de l’interleukine 1-bêta ou des antagonistes du récepteur de l’interleukine 6. De manière symétrique, les patients porteurs de maladie coronaire font l’objet d’essais thérapeutiques qui évaluent les effets cardio-vasculaires du méthotrexate et de l’inhibition de l’interleukine 1-bêta.L’ensemble de ces essais thérapeutiques dans les deux pathologies permettront de confirmer ou d’infirmer l’hypothèse inflammatoire de l’athérosclérose.

L’inflammation est présente dans l’athérosclérose et dans les pathologies articulaires.

Les mêmes médiateurs inflammatoires sont à l’origine de la progression de l’athérosclérose et de la pathologie articulaire.

Les patients porteurs de pathologie inflammatoire sont plus à risque cardiovasculaire et les épisodes aigus sont plus sévères.

Les nouveaux essais thérapeutiques permettront d’y voir plus clair dans le rôle précis de l’inflammation au niveau du risque cardio-vasculaire.

  1. Maradit-Kremers H et al., Increased Unrecognized Coronary Heart Disease and Sudden Deaths in Rheumatoid Arthritis .2005Feb;52(2):402-11.

  2. Eur Heart J. 2015 Dec 21;36(48):3413-22.

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